Le Cap Horn : un cap si difficile à passer...
La règle de trois du Vendée Globe
Trois mois de navigation, trois océans, trois caps mythiques... Lors d’un entretien précédant le départ du neuvième Vendée Globe le 8 novembre 2020, les skippers ont été invités à donner spontanément quelques mots illustrant leurs impressions face à cette course monumentale. Fabrice Amedeo (Newrest) parle de « Cap Horn » et de « quête », Damien Seguin (groupe Apicil) cite « une aventure, extrême et solitaire », Thomas Ruyant (LinkedOut) « intense, historique, magique », Jérémie Beyou (Charal) « extrême et... extrême », Sébastien Destremau (Merci) « une immensité, une profondeur, une liberté aussi ! », Manuel Cousin (Groupe Setin) « une course de dingue ». Alan Roura (La Fabrique) confie : « J’ai toujours peur d’y aller, c’est pour ça en fait que c’est intéressant d’y retourner, c’est de surmonter encore une fois cette peur. J’y vais avec une boule au ventre énorme et avec une joie de me dire que je vais revivre cette expérience de fou. C’est cela, le Vendée Globe ». Damien Seguin, premier handisport à affronter cette course, évoque, sous l’œil paternel de Jean Le Cam, vouloir « découvrir dans ces endroits ce qu’on ne trouve nulle part ailleurs ».
Le Cap Horn, un absolu
Ce tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance prend un sens sacré, voire sublime quand le Cap Horn pointe à l’horizon. Jean Le Cam, dit Le Roi Jean, raconte : « Quand tu arrives là, tu prends conscience de ce que cela voulait dire quand les marins sur les anciens bateaux disaient « Terre ! Terre ! », parce que... c’est le temps qui fait l’émotion... tu n’as pas vu la terre depuis deux mois ! C’est ça qui est chouette !». Ce cap défie l’entendement... Dans les temps anciens, certains bateaux devant le passer d’est en ouest, à contre vent, pouvaient stagner face à l’Inquisiteur pendant ... deux ou trois mois. Voire même reculer, les cales pleines de denrées à livrer en Asie. De quoi en perdre la raison. Lieu de rencontre entre le Pacifique et l’Atlantique, les eaux y galopent, leurs bouillonnements s’accordant au son des vents en furie. Au cours du Vendée Globe 2008-2009, le Roi Jean frôla les fantômes des 10 000 hommes disparus au Cap Horn, son naufrage s’ajoutant aux quelques 800 consignés par l’Histoire. Son Sauveur ? Vincent Riou. Alors... pourquoi tant souffrir ? Pourquoi vouloir précipiter son destin dans un environnement si hostile ?
Un passage obligé, ou presque...
Pour les uns, s’affronter au Passage de Drake, goulot vertigineux entre le Cap Horn et l’Antarctique, relève d’un défi personnel. Au XVIIe siècle par contre, peu d’autres alternatives s’offrent aux navires marchands faisant négoce avec l’Asie. La Compagnie néerlandaise des Indes orientales détient le monopole de ce commerce, qu’elle achemine par le très dangereux détroit de Magellan, plus au nord. En 1615, Isaac Le Maire, marchand d'Amsterdam exaspéré par son monopole, monte une expédition pour trouver une nouvelle route vers le Pacifique. Son fils Jakob et le capitaine Willem Shouten mettent les voiles en mai 1615, arrivent à l’extrême sud du continent américain en décembre et doublent le Cap Horn début 1616. Shouten le baptise du nom de sa ville natale, Hoorn. S’ouvre ainsi une nouvelle route maritime vers l’Asie. Le dernier voilier de commerce à croiser ce lieu mythique est le Pamir en 1949. De nos jours, les skippers du Vendée Globe s’y présentent tous les quatre ans, après un corps à corps avec le Pacifique. Leur point commun ? Des femmes et des hommes ivres de vent et de retrait du monde. Le Cap Horn les leur promet.
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