Station balnéaire portée disparue
Monsieur Descartes, l’Atlantide existe bien ...
Les civilisations anciennes nous ont transmis des récits fascinants sur des îles ou des villes mystérieusement englouties, devenues d’éternelles sources d’enchantement pour les esprits romanesques. L’Atlantide en incarne bien sûr l’exemple le plus emblématique mais d’autres noms font tout autant voguer les imaginaires : Pavlopétri, port grec au sud du Péloponnèse, Kitèje, qui, murmure-t-on, sommeille sous l’étrange lac russe Svetloïar, Ys, ondulant sous les eaux bretonnes... Ces lieux suscitent tant de phantasmes que certains regretteraient presque d’en découvrir des traces tangibles ... sauf les cartésiens. Que ces tempéraments rationnels se rassurent : il existe sur notre planète une ville engloutie dont des preuves matérielles abondent. Bienvenus à Bayocean, l’Atlantide de l’Oregon.

L’océan Pacifique n’est pas pacifique
Le lieu est splendide, caractéristique du Nord-Ouest Pacifique où la nature d’un vert profond plonge dans l’océan qu’Olivier de Kersauson traita de faux ami. On peut supposer que T.B. Potter, promoteur immobilier de Californie et fondateur de Bayocean en 1906, son fils, Thomas Irving Potter et Francis Drake Mitchell, qui prendra leur relève, ont considéré le Pacifique comme tel, leur station balnéaire n’existant plus, dévorée par les eaux... La dernière maison a sombré dans les abysses en 1960, le brave Francis Drake Mitchell en est devenu fou... Que s’est-il passé ? Une fâcheuse combinaison entre un environnement instable et des hommes d’affaires pugnaces... mais sourds... S’ils avaient écouté les tribus indiennes autochtones de la baie de Tillamook, ils auraient compris que construire une ville sur la péninsule sablonneuse située entre cette baie et l’océan n’était vraiment pas une bonne idée.

Sous la plage, les pavés...
Les Potter ont une longue expérience de la promotion immobilière quand ils repèrent cette mince bande de sable entre deux eaux : l’une en furie, l’autre apaisée. Spectacle garanti. Ils ciblent une clientèle de Portland, conviée à investir dans Bayocean, future station balnéaire au chic similaire, vante-t-on, à celles de la côte ouest. On édifie un bâtiment administratif, un magasin, un bureau de poste, un hôtel, une piscine d’eau de mer dotée d’une machine à produire des vagues... celles du Pacifique ne devaient pas suffire... On imagine l’océan fulminer en apprenant la nouvelle... On pave et éclaire les rues, on construit une ligne de chemin de fer, des maisons, un cinéma. Les lots se vendent bien mais les investisseurs grondent : coûts élevés et érosion accélérée depuis la construction d’une jetée à l’entrée de la baie. La ville commence à sombrer en 1920 et disparaît en 1960. Peu de monde s’en souvient... Pourtant, sous la plage de la péninsule aujourd’hui déserte dorment ses pavés.
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