Octobre festif
Un tournant radical de l’Histoire
Le 2 janvier 1492, en Espagne, Isabelle (reine de Castille de 1474 à 1504) et son époux Ferdinand (roi d'Aragon de 1479 à 1516), marquent l’épisode de fin de la Reconquête (chrétienne) dans la péninsule par l’entrée de leur armée dans Grenade, dernier État musulman d’Europe de l’ouest. Après huit siècles de cohabitation délicate entre les « gens du Livre », cette victoire amorce un changement radical dans la politique de la monarchie espagnole : le 31 mars 1492, la signature du Décret de l’Alhambra acte l’expulsion des juifs d’Espagne « coupables d’apostasie envers notre Sainte foi Catholique ». Les musulmans pourront eux rester sur le territoire, conserver leur religion, leur système juridique et leurs possessions. Ce n’est que quelques années plus tard, au tournant du XVIe siècle, que leur sera imposée la conversion au christianisme. Ainsi sonne le tocsin de fin de l’exception espagnole qui, tout au long du Moyen Âge, avait su construire un modus operandi singulier : permettre, en terres chrétiennes, de conserver sa foi en exigeant, en retour, une loyauté sans faille à la monarchie.
Le monde change …
Témoin de ces événements, Christophe Colomb fut aussi observateur de l’avancée rapide des Portugais vers les Indes orientales : de Ceuta en 1415 au passage du Cap de Bonne Espérance en 1488, les Lusitaniens se révèlent être de redoutables conquérants. Dans un tel contexte, le Génois nourrit l’espoir de se faire entendre, lui qui, depuis longtemps, pense pouvoir accéder aux Indes par l’ouest. Peu écouté, il va toutefois bénéficier du climat d’euphorie spirituelle né de la victoire des Rois Catholiques. Une belle revanche pour ceux qui avaient été, 40 ans avant, sidérés par l’installation des Ottomans entre Europe et Asie après la chute de Constantinople (1453). Fin janvier 1492, la chance sourit à Colomb : son projet atlantique est examiné sérieusement par l’administration royale espagnole qui, entre les obstacles portugais et turcs côté oriental, y voit une opportunité de se déployer vers l’ouest. Le calendrier s’accélère rapidement puisque ... le 3 août (!), la Pinta, la Niña et la Santa Maria larguent les amarres à Palos de la Frontera (Andalousie).
Que de fêtes !
Moins de deux mois et demi plus tard, le 12 octobre 1492, Christophe Colomb débarque sur l’île de Guanahani (qu’il baptisera du nom messianique de San Salvador), dans l’archipel des Bahamas, pensant avoir atteint les côtes indiennes. La suite est fulgurante et bien connue... En 1506, après quatre voyages riches en aventures, l’amiral passe de vie à trépas ne pouvant imaginer qu’après lui, le 12 octobre deviendrait fête nationale ou jour férié dans plusieurs pays. L’Espagne tout d’abord qui, en 1892, à l’occasion du 400e centenaire de la découverte de l’Amérique, choisit cette date par décret-royal pour devenir l’emblème de la nation. Aux États-Unis, le Columbus Day, 2e lundi d’octobre, est férié depuis 1934, par décision de Franklin D. Roosevelt. On y célèbre la découverte de l’Amérique mais... depuis quelques années, le mythe prend l’eau et est peu à peu remplacé par l’autre Histoire : celle de la prise de conscience du fait que l’Amérique était peuplée avant l’arrivée des Européens. Parler de découverte devient alors coquille vide. Aux yeux de Colomb, observateur devenu céleste, point de débat : ce fut bien, pour lui, la révélation d’un Monde Nouveau, fruit de la Providence.
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