Voici le récit de la navigation que nous avons effectuée entre le 15 mai et le 22 mai 2021 au Nord de la Sardaigne, avec un groupe de 9 amis sur GACRUX, un Oceanis 51.1 loué chez Filovent. Cette croisière, initialement prévue pour 2020 mais reportée à cause du confinement, nous a laissé à tous des souvenirs inoubliables. L’itinéraire que je m’apprête à vous partager a démarré à la marina Cala dei Sardi à Portisco, mais les escales qui y sont détaillées s’appliquent aussi sans problème à un départ d’une base proche, comme la marina d’Olbia, Cannigione, ou encore Palau, toutes accessibles en moins de 40 minutes de navette depuis l’aéroport d’Olbia - Costa Smeralda.
- Jour 1 : Portisco → Tavolara
- Jour 2 : Tavolara → Cala Brandinchi → Poltu Ottiolu
- Jour 3 : Poltu Ottiolu → Cala di Volpe → Caprera
- Jour 4 : Île de Caprera → Île de la Maddalena
- Jour 5 : Île de Maddalena → Passo Cecca di Morto → Santa Teresa di Gallura
- Jour 6 : Santa Teresa di Gallura → Lavezzi → Passo Cecca di Morto
- Jour 7 : Passo Cecca di Morto → Portisco
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Côté météo, le Soleil a brillé tous les jours, et nous avons eu entre dimanche et mercredi un temps assez venteux (force 5 et plus, soit plus de 40 km/h) puis cela s’est calmé pour devenir paradisiaque. Pas de pluie à déplorer, d’ailleurs la Sardaigne est réputée pour être encore plus sèche que la Corse. De manière générale, partez du principe que le vent est plutôt de secteur Ouest / Nord-Ouest, à part quelques épisodes de Sirocco (vent de Sud en provenance du Sahara) en été. Notons aussi que le vent est naturellement accéléré par effet Venturi dans les Bouches de Bonifacio, c’est-à-dire entre la Corse et la Sardaigne, pouvant rendre la navigation et surtout le mouillage délicat dans les îles de la Maddalena et les Lavezzi.

Si vous n’avez pas le temps de lire le détail de l’itinéraire, voici les grands points d’intérêt que je retiens :
- Le petit archipel de la Maddalena, qui est une très belle réserve naturelle (essentiellement l’île de Caprera et le Passo Cecca di Morto entre les 3 îles de Budelli, Razzoli et Santa Maria, tout au Nord de l’archipel).
- L’impressionnante île de Tavolara, une vraie curiosité géologique. Il s’agit d’un bloc de calcaire de 5km sur 1, entouré de forêts avec une très belle plage sauvage à l’Ouest. Elle culmine à 565 mètres de haut, ce qui la rend visible de très loin.
- Les nombreuses criques au Sud d'Olbia, face à Tavolara, avec leurs eaux cristallines et leur sable aussi fin qu’en Atlantique (en particulier sur la magnifique Cala Brandinchi). Toute cette zone est moins fréquentée en été que la Maddalena ou la Costa Smeralda (Porto Cervo, Porto Rotondo, etc…). Pourtant, elle vaut le détour et offre de bons mouillages abrités pour qui veut éviter les ports onéreux.
- Les îles Lavezzi dans les bouches de Bonifacio, entre la Corse et la Sardaigne : un micro-archipel granitique exceptionnellement beau, sauvage, avec une eau turquoise merveilleuse. Comme quoi, il n’est pas nécessaire de prendre un bateau en Corse pour aller mouiller au milieu de ce trésor. Il est tout à fait accessible depuis la Sardaigne !
Jour 1 : Portisco → Tavolara (14 milles, 2 à 3 heures de navigation selon le port de départ)
Après l’inventaire et la prise en main du bateau avec le chef de base, nous appareillons et quittons la Cala dei Sardi en fin d’après-midi. Nous mettons les voiles une fois hors du Golfe de Portisco, passons le Capo Figari avec ses hautes falaises, et mettons le cap sur la monumentale île de Tavolara. Cet énorme massif calcaire haut de 565 mètres se dresse au milieu de la mer à 1 mille de la côte. Il se prolonge par une petite langue de terre sablonneuse à l’Ouest (côté Sardaigne), la Spiaggia Spalmatore, offrant un mouillage somptueux et protégé par vent d’Ouest modéré. Nous y mouillons par 5 mètres avec fond de sable, et passons la soirée dans ce décor majestueux. L’évasion a officiellement commencé !


Jour 2 : Tavolara → Cala Brandinchi → Poltu Ottiolu (9 milles, 2 heures ; puis 7 milles, 1h30)
Le petit déjeuner se fait sous le regard de l’imposante Tavolara, avant une petite expédition à terre. On accoste en annexe sur une très jolie plage où se trouve un bar / restaurant sympathique, puis on commence l’ascension par un chemin de randonnée. Le début est assez facile, puis la randonnée se corse. Au bout d’une heure, nous faisons demi-tour avant la partie via ferrata qui nécessite un guide pour atteindre le sommet de l’île. Mais de là où nous sommes, la vue est déjà imprenable sur la Sardaigne et notre minuscule bateau face à la plage à 300 mètres en contrebas !
Une fois de retour à bord, nous mettons les voiles vers le Sud Ouest, cap sur la très belle Cala Brandinchi, très connue des locaux. L’eau y est d’un turquoise exceptionnel, et surtout, je n’ai jamais marché sur un sable aussi fin en Méditerranée. On se croirait vraiment en Atlantique. D’ailleurs, la plage est surnommée “Petit Tahiti”. La vue sur Tavolara au loin rend le tableau singulier. Nous nous y baignons pendant le milieu d’après-midi, avant de repartir vers le Sud pour passer la soirée à Poltu Ottiolu, un village charmant bâti autour d’un très joli port, bien abrité, adjacent à une petite plage. Nous dînons dans un très joli restaurant, le Caffé Nautilus, sur les quais. Le repas ne m’a pas particulièrement marqué, mais le cadre est indiscutablement splendide.


Jour 3 : Poltu Ottiolu → Cala di Volpe → Caprera (Cala Caprese) (25 milles, 5 heures ; puis 12 milles, 2 heures)
La journée sportive de la croisière..! 4 d’entre nous nous levons en même temps que le Soleil pour commencer la navigation. L’idée est de faire un long bord d’environ 7 heures vers le Nord pour rejoindre l’archipel de la Maddalena et mouiller à Caprera, l’île la plus à l’Est de la réserve naturelle. Sur le chemin, alors que nous passons à proximité de Tavolara, nous essuyons à coup de williwaw, un courant d’air froid fulgurant dévalant la montagne vers la mer, faisant passer le vent de 20 à 50 nœuds pendant quelques secondes. Ce phénomène d’une violence inouïe, fréquent dans les Fjords et en Terre de Feu, amène des rafales montant à 100 km/h voire plus pendant quelques secondes, ce qui peut faire démâter un bateau trop toilé. Heureusement, nous avons pu l’anticiper et nous mettre face au vent, avertis par les nuages d’écume qu’il transportait en s’approchant de nous à toute vitesse. La grosse montée d’adrénaline de la croisière, sans aucun doute !
Puis le vent forcit peu à peu et se révèle plus violent que prévu (environ 35 noeuds vers midi contre 20 noeuds annoncés), ce qui nous oblige à changer notre plan et à mettre le moteur pour nous abriter dans la jolie Cala di Volpe, à quelques kilomètres au Nord de Portisco, où nous avons pris le bateau 2 jours plus tôt. Nous y passons l'après-midi, mouillant par 3 mètres de fond dans une eau étonnamment translucide. Quelques violentes rafales chahutent le bateau malgré tout, mais l’ancre tient très bien. Puis en fin de journée, avec un vent plus raisonnable (force 5) nous remettons les voiles vers Caprera où nous arrivons de nuit, éclairés par un somptueux clair de lune. Nous jetons l’ancre par 6 mètres de fond dans la Cala Caprese, une grande crique bien abritée des vents d’Ouest (l’un des quelques mouillages du parc de la Maddalena où l’ancre est autorisée), et faisons une soirée jeux de société sous un magnifique ciel étoilé.


Jour 4 : Île de Caprera → Île de la Maddalena (Cala Spalmatore) (6 milles, 1 heure)
Comme nous sommes arrivés de nuit, nous découvrons au petit matin le décor dans lequel nous avons mouillé ! Nous sommes dans la grande baie de Cala Caprese, située au Sud-Est de l’île de Caprera. L’eau est très turquoise (on commence à s’y habituer !) et au fond de la baie se trouve une fine bande de sable, donnant à la fois sur le Nord et sur le Sud, face au “continent”, si l’on considère que la Sardaigne est un continent par rapport à l’archipel.
Comme la météo prévoit un fort vent jusqu’en fin de journée et que nous sommes bien protégés par une petite falaise, nous décidons de passer la journée ici. 2 amis choisissent de se reposer à bord, et nous autres partons à terre en annexe pour une randonnée improvisée. Nous faisons le tour de Caprera, qui est une très belle île sauvage, presque inhabitée et préservée. Nous y rencontrons de nombreux sangliers, dont une laie avec ses petits, avec lesquels nous gardons nos distances, ainsi que quelques bouquetins et de nombreux oiseaux sauvages. L’une des rares habitations est la maison de Giuseppe Garibaldi, le héros de l’unification italienne au XIXème siècle, qui vécut à Caprera en ermite pendant près de 20 ans quand il n’était pas impliqué dans des conflits militaires. Comptez environ 2 heures pour faire le tour de l’île. Puis nous traversons le pont qui mène à l’île de la Maddalena à quelques centaines de mètres à l’Ouest de Caprera. Cette île, la principale de l’archipel éponyme, y est la seule à être habitée, comptant une petite zone industrielle et un très joli centre ville historique avec un port.
Nous y prenons un verre avant de rebrousser chemin pour retourner au voilier. Une fois le dîner terminé, nous appareillons, direction la Cala Spalmatore au Nord-Est de l’île Maddalena. Après une heure de navigation consistant à contourner Caprera par le Nord, et à rallier l’île de la Maddalena, nous nous amarrons à une bouée à la tombée du jour.


Jour 5 : Île de Maddalena (Cala Spalmatore) → Passo Cecca di Morto → Santa Teresa di Gallura (5 milles, 1 heure ; puis 10 milles 2 heures)
Nous nous levons en milieu de matinée, et mettons les voiles pour contourner Maddalena par le Nord, et slalomer entre elle et les petits récifs au Sud des trois îles (Budelli, Razzoli, et Santa Maria). Je dis “les 3 îles”, car ces dernières se touchent quasiment. A leur intersection, se trouvent un mouillage sublime, le Passo Cecca di Morto.
Nous tirons quelques bords amusants par un vent de Nord Ouest force 5 (environ 35km/h). Vers midi, nous mouillons légèrement au Sud du Passo Cecca di Morto, pour nous abriter convenablement pour le déjeuner. L’un d’entre nous donne à manger à une mouette, ce qui en quelques minutes en attire une bonne quinzaine à l’arrière du cockpit. Leurs cris, qui ressemblent à des miaulements, accompagnent alors la suite de ce repas quelque peu hitchcockien. Il faut dire que nous sommes le seul bateau des environs.
Puis nous repartons en milieu d’après-midi, direction le port de Santa Teresa di Gallura, la ville la plus septentrionale de la Sardaigne, qui fait face à Bonifacio. Sur le chemin, le vent forci assez durement (un bon force 6, environ 45 km/h) et nous naviguons contre une houle assez conséquente. En effet, dans les “Bouches de Bonifacio”, c’est-à-dire entre la Corse et la Sardaigne, 1) le vent d’Ouest est accéléré par effet Venturi, ajoutant facilement une dizaine de noeud par rapport au vent constaté en Corse et en Sardaigne, et 2) on est exposés à la houle du large qui n’est pas arrêtée par les côtes.
Vers 19 heures, nous arrivons dans la jolie marina de Santa Teresa, au fond d’un port naturel très protégé. Les abords sont charmants et colorés. Le soir, nous dînons dans les hauteurs en centre ville, au “Ristorante Da Thomas” (très bon restaurant de fruits de mer, pour 25 à 50 euros par tête).


Jour 6 : Santa Teresa di Gallura → Lavezzi → Passo Cecca di Morto (7 milles, 1h30 ; puis 5 milles, 1 heure)
De temps en temps, une bonne nuit au port fait du bien ! On dort bien, on se lave dans de vraies douches, et on prend un petit déjeuner à terre. 3 d’entre nous sont chargés de faire quelques courses, puis nous quittons le port. La nuit nous a coûté 48 euros, ce qui est peu pour un 51 pieds, bien que nous soyons en basse saison.
Nous mettons le cap vers une terre française : les Lavezzi, plus précisément vers Lavezzu, l’île principale de ce magnifique archipel, situé à environ 5 milles au Sud de Bonifacio. Comme le vent est faible et que la mer est calme, contrairement à la veille, c’est le jour rêvé pour y mouiller. Et pour cause : l’arrivée est presque irréelle. En jetant l’ancre par 6 mètres de fond, dans la Cala di Giunco, côté Sud, nous mouillons LITTÉRALEMENT dans une piscine, tant l’eau est bleu turquoise et translucide. Les poissons, des sars, qui y sont en sécurité puisque la zone est protégée, viennent s’attrouper derrière notre cockpit, espérant que nous allons leur donner quelque chose à manger ! Nous piquons immédiatement une tête pour aller nager au milieu d’eux (ils ne sont pas vraiment farouches !).
Après un bon risotto de notre nonna Antonio (surnom donné à notre équipier cuisinier), nous prenons l’annexe pour aller à terre et faire le tour de l’île. Nous nous arrêtons bien sûr dans le cimetière des naufragés de la Sémillante, cette frégate de 54 mètres qui en hiver 1855, prise dans une tempête, heurta à pleine vitesse un récif non loin de là. Les 773 hommes d’équipage y perdirent tragiquement la vie, et reposent depuis dans ce paradis qu’est Lavezzu. Quelques touristes se promènent sur l’île, mais après 18 heures (le dernier bateau retour pour Bonifacio, je présume), plus personne sur l’île, et nous sommes vraiment seuls avec les deux ou trois bateaux qui mouillent dans la Cala Lazarina, à côté de notre crique. Alors que le jour tombe, l’émeraude de l’eau s’obscurcit peu à peu, le ciel prend des couleurs dorées, tandis que les blocs de granit trônent fièrement, immobiles et éternels. Après avoir apprécié ce spectacle singulier pendant l’apéritif, nous nous dirigeons vers le Sud-Ouest, cap sur les 3 îles de Budelli, Razzoli et Santa Maria, avant de mouiller une heure plus tard dans le Passo Cecca di Morto, par environ 3 mètres de fond.




Jour 7 : Passo Cecca di Morto → Portisco (24 milles, 5 heures)
Une journée de convoyage retour, peut-on dire… Nous nous levons un peu avant 8 heures au milieu du sublime Passo Cecca di Morto, que nous n’avions pas eu vraiment le temps d’apprécier lors de notre première escale à cause du vent. Après notre dernier petit déjeuner à l’ancre, nous mettons les voiles pour Portisco. La route étant assez longue et le vent faiblissant, nous terminerons au moteur. Nous repassons alors devant Maddalena, Caprera, le Capo Ferro, Porto Cervo, le Capo Capaccio, avant de mouiller devant Porto Rotondo, près de Portisco, pour un déjeuner tardif. C’est enfin l’heure d’aller faire le plein d’essence et d’amarrer le navire à la Cala dei Sardi, la base de notre armateur. Pour le dîner, nous nous faisons un dernier restaurant à Portisco pour débriefer les meilleurs moment de la croisière et surtout… commencer à parler de la prochaine !
Quelques moments forts de la croisière...


